Conseils de lecture
Tendre et poétique
Jusqu’à nouvel ordre pour marcher il faut deux jambes, deux appuis. Edmond Baudoin depuis son enfance, avec son frère Piero, les possède et les utilise pleinement. La première de ces jambes s’appelle le dessin dont il décidé à l’âge de trente ans, après des années comme comptable, d’en faire son métier. La seconde se nomme le voyage, l’itinérance seul près de son village de Villars, dans l’arrière pays niçois, ou accompagné parfois pour des voyages lointains avec des compères comme Troubs ou Emmanuel Lepage. On peut y ajouter l’écriture puisque on désigne communément Edmond Baudoin comme le premier dessinateur de BD à raconter sa vie dans ses ouvrages, l’exofiction en avant première. Aussi est il bien le seul à s’étonner quand il nous déclare ne pas comprendre pourquoi on lui a demandé un livre sur la marche, dans le cadre d’une collection dédiée. « Nous sommes des millions à marcher. Pourquoi moi? ».
La réponse s’impose à elle même à la lecture de ce petit ouvrage touchant et sincère, comme d’habitude avec le dessinateur, qui fait effectivement un pas « hors des cases ». Mais pas tant que cela, tant ces cent quinze pages constituent un texte pictural. A travers les chemins près de chez lui, celui de Saint Jean, titre d’une de ces BD ou sa variante, vers Sarzit, puis ceux du monde entier, le Québec, la Colombie ou le Mexique, il laisse les traces au sol et sur le papier de son existence et nous donne à voir des paysages, des personnages comme il le fait avec son pinceau.
C’est doux, tendre et poétique. On y retrouve, Jeanne, sa mère, Piero, son frère mais aussi ses thèmes favoris, ses amours féminins et ses corps qu’il aime dessiner plus que tout et sur lesquels il arrive à poser cette fois-ci des mots. Les arbres des milliers de fois peints, fil rouge de nombre de ses ouvrages, sont aussi bien entendu présents et leur importance, expliquée. Baudoin, on a envie de l’appeler Edmond, montre comment la marche, même quand elle se fait près de chez lui à Paris, dans le Jardin du Luxembourg, se confond avec la vie. Combien elle est la vie.
On l’aura compris, ce livre d’écrivain ne peut se dissocier du dessinateur. Le pinceau, celui dont on se demande si il dessine en noir sur du blanc ou si il pose du noir pour laisser le blanc dessiner, ne peut vivre sans l’accompagnement du stylo, cet accessoire que le dessinateur met avec ses carnets lorsqu’il part en balade, en prévision du futur « chef d’oeuvre » qui l’attend au retour et s’évanouira au fil de sa réalisation. Il s’est tellement confié dans ses bandes dessinées, que l’on ne s’étonne pas de retrouver ici ses pensées intimes, sans filtre, ou si peu. Il se livre, se confie puisque « la vie est comme une balade ».
On marche dans le réel et dans l’imaginaire, sur le chemin et sur la page blanche, dans la jeunesse et dans la vieillesse, on marche seul et accompagné, dans la réalité et dans le rêve. On marche avec.
Les lecteurs de BD de Baudoin retrouveront leur compagnon de lecture et de route, comme un complément indissociable des ouvrages graphiques. Les autres découvriront un homme attachant, sincère, et auront probablement envie d’aller à la rencontre de ses dessins exceptionnels. Toutes et tous souhaiteront prendre un sac à dos et marcher avec lui. Au moins par la pensée tant Baudoin fait un formidable compagnon de voyage.
Une jeune femme ambitieuse
Emmanuelle est une jeune femme ambitieuse. Interne en chirurgie à la Pitié-Salpêtrière, elle met tout en oeuvre pour être adoubée par le Grand Professeur !
Elle va devenir son poulain, et être prise à son propre piège...
Ce 2e roman de Jessica Knossow est une plongée dans le monde des chirurgiens, qu'elle décrit avec précision, passion et humour !
Mais, que va devenir Emmanuelle, cette étudiante brillante, entre les mains du professeur Renavand ? Il y a un aspect thriller dans ce livre qui nous tient jusqu'à la dernière page.
Roman incisif, poétique, après "La Jongleuse", premier roman formidable, Jessica Knossow confirme son talent.
Vanessa
Elan vital
"Le désir est l'essence de l'homme", selon Spinoza. Pourtant, le désir a longtemps été jugé négativement, comme un manque douloureux, une envie coupable ou une source d'insatisfaction perpétuelle. L'écrivain philosophe nous guide ici dans une relecture des grands textes fondateurs de la philosophie et des religions, afin de redéfinir la place du désir aujourd'hui, entre tentations consuméristes et quête de sens. Plus que jamais, le désir d'être au monde actif et conscient se révèle une question urgente, pour chaque individu, les sociétés démocratiques et un partage équitable et pacifique des ressources de la planète. Pour un usage vivant des désirs. Anne-Marie
Indispensable !
L'auteur italien surnommé Zerocalcare nous avait déjà touché avec "Kobane calling", son premier reportage graphique au Kurdistan. Dans celui-ci, il retourne en Irak à la rencontre des Ezidis de Shengal où cette minorité religieuse (plus connue en France sous le nom de Yézidi) a été abandonnée, et massacrée par Daech en 2014.
Pourtant, ils résistent et mettent en oeuvre à Shengal un fonctionnement démocratique très avancé : égalité femmes-hommes, décisions collectives et respect de l'ensemble des communautés quelles que soient leur religion, leur origine, leur culture.
Le sujet particulièrement poignant est traité par l'auteur avec une infinie délicatesse et une autodérision formidable ! Vous ne pourrez pas vous empêcher d'éclater de rires, et pourtant on termine la dernière page à la fois bouleversés et en colère car ces peuples qui résistent à l'oppression sont les oubliés de l'histoire.
Vanessa
Mémorial de la Shoah - Spirou dans la tourmente de la Shoah
De Bravo, Didier Pasamonik, Caroline François
Dupuis
Instructif !
A l’origine : l’exceptionnelle quadralogie d’Emile Bravo intitulée Spirou. L’espoir malgré tout. L’auteur raconte les années de guerre en Belgique du groom après sa naissance sous le crayon de Rob-Vel en 1938 et avant sa réapparition en 1946 par Franquin. Dans ce récit initiatique, Spirou est confronté à tous les évènements du conflit mondial: rafle, antisémitisme, Auschwitz, bombardements, Gestapo. Au fil des pages se noue une forte relation amicale de Spirou avec le peintre juif Felix Nussbaum, personnage réel, décédé à Auschwitz-Birkenau en 1944.
C’est cette fresque exceptionnelle qualifiée « de la bande dessinée la plus importante écrite sur la Shoah depuis Maus d’Art Spiegelman » par le commissaire d’exposition Didier Pasamonik, associée à la lecture de La véritable histoire de Spirou (1937-1946) de Christelle et Bertrand Pissavy-Yvernaut (Dupuis 2013), qui incita à la création de cette exposition et de son remarquable catalogue.
Les 4 tomes de la BD de Bravo constituent le fil conducteur de l’ouvrage. Après les premières pages consacrées à la création de Spirou par Rob-Vel, le scénario de L’espoir Malgré Tout, structure les chapitres du livre. La fin de l’ouvrage s’accompagne d’une interview passionnante d’Emile Bravo.
Magnifiquement mis en page, construit intelligemment, accompagnés d’illustrations, de documents d’archives passionnants. Les amateurs de BD y trouveront leur compte. Les amateurs d’Histoire aussi.