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Jean T.

https://lecturesdereves.wordpress.com/

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Éditions Gallmeister

22,40
Conseillé par (Libraire)
9 août 2017

Linda habite avec ses parents, dans une cabane au-dessus d’un lac, dans une forêt du Minnesota. La dernière cabane d’une communauté qui s’est désagrégée au fil du temps. Elle mène une vie décalée, sauvage, très proche de la nature qui l’entoure. L’adolescente est attirée par une famille qui s’est installée pas très loin, dans une cabane beaucoup plus moderne, dont elle observe la vie au travers des baies, avec des jumelles. Une jeune femme y vit seule avec son enfant, Paul. Comme le père est éloigné par son travail, Patra demande à Linda de s’occuper un peu du garçon, d’abord de temps à autre, puis les après-midis, pour disposer de temps afin de corriger le futur livre de son époux. Comme Paul s’est attaché à elle et pour tromper sa solitude, Patra la garde à manger. Une complicité forte s’installe entre Paul et Linda. Quand le père revient d’Hawaï, Linda constate que Patra et Léo sont différents. Autant elle est légère et gaie, facile à vivre, autant Léo se montre rigide sur les principes, autoritaire sans en avoir l’air. Madeline est un peu perdue entre ces deux personnalités si différentes. L’adolescente ne connaît pas encore suffisamment la vie pour décrypter ce qui se passe entre eux, quelles sont leurs références de vie. Quand au cours d’une sortie, Paul devient malade, elle ne voit pas ce qui se passe et intervient bien trop tard…

Dans ce roman publié par Gallmeister, on n’est pas surpris que la jeune Linda entretienne une relation forte avec son environnement, la forêt, le lac, les arbres. On comprend qu’elle soit un peu sauvage, que ses camarades la moquent parce qu’elle vient au lycée avec ses chaussures de randonnées, et aussi parce qu’elle ne s’intéresse qu’aux loups. Emily Fridlung campe une Linda très sensible aux autres, à la nature, introspective. On la sent en harmonie avec la forêt. Pourtant, très tôt, quelques indices empêchent le lecteur de se déprendre d’une sourde angoisse, d’un trouble insidieux, d’une inquiétude tenace. Le monde du roman est trop calme, trop harmonieux. Pourquoi Patra se montre-t-elle aussi accueillante, au risque que son fils s’attache trop à Linda ? Quand Léo arrive dans la cabane au bord du lac, on comprend quel est leur système de valeurs. On comprend que ces chrétiens scientistes sont mus par leur croyance plus que par la réalité, ce que Linda ne peut décrypter. Elle restera marquée par cette expérience de vie.

Il y a dans cette histoire troublante, qui est tout à la fois un thriller et un roman d’initiation, de très belles descriptions de la nature, du rapport de la jeune fille à la forêt, aux événements. Les descriptions sont toujours précises, détaillées. Linda est une bonne observatrice qui n’est distraite par aucun des artefacts du monde moderne. Dans un contraste total, ce que l’auteur nous laisse entrevoir du monde des scientistes est glaçant.
Un premier roman servi par une belle écriture.

13,80
Conseillé par (Libraire)
9 août 2017

Une dame âgée, Danielle, retrouve sa villa méditerranéenne où elle va accueillir sa famille. C'est une tradition, chaque année au mois d'août, son fils Pierre-Marie et son petit-fils Arthur la rejoignent . Cette année, Danielle voudrait qu'il y ait du mouvement, que ce séjour soit différent des précédents. Elle voudrait qu'il se passe quelque chose dans sa famille peu bavarde et peu extravertie. C'est pourquoi elle a embauché Prisca, une jeune fille pour l'aider dans la vie quotidienne et, aussi, pour briser la monotonie de ce rituel. La jeune femme est énigmatique -d'où vient qu'elle sait reconnaître un météorite ?-, un peu étrange, vit avec liberté parmi ces gens qui ont des habitudes. Quelques jours suffisent pour que Prisca intrigue Danielle, ressuscite l'envie de plaire chez Pierre-Marie, initie Arthur à la vie amoureuse et lui ouvre la voie de la vie adulte.
En créant des personnages scientifiques -Danielle a été une neurologue réputée, son fils est psychiatre, Arthur est un étudiant brillant passionné de programmation informatique- l'auteure les prédisposent à poser un regard critique et acéré sur leurs comportements, leurs sentiments, leurs états d'âme, leur histoire passée ou à venir. Grâce à Prisca, Danielle atteint son objectif. Elle déstabilise sa famille, fait chacun se poser des questions, chercher le sens de ses actes, avoir envers soi un comportement de scientifique, reconnaître ses manques, discerner ses désirs. La présence de Prisca, et surtout son absence, auront réussi à les rendre à la vie qui est mouvement, élan, dynamique, qui se meut vers un futur désiré.
Tout ceci se passe dans un bel été méditerranéen, de beaux paysages, le calme des vacances, avec des histoires qui se perpétuent et se transmettent -même le météorite qui trône dans la maison a son histoire poétique qui se superpose à son histoire réelle, et dans une écriture tranquille, attentive et suave.

Conseillé par (Libraire)
27 juillet 2017

Je n’ajouterai pas au concert de louanges qui a accompagné la publication de Quand sort la recluse. Ce roman est une réussite de plus. Sans doute est-ce de pouvoir admirer la mécanique intellectuelle du commissaire Adamsberg qui m’a davantage séduit.

Il y a cependant un aspect -très vénal, j’en conviens- qui n’a pas été signalé à ma connaissance. Comme une sorte d’introduction à l’enquête sur les morts mordus par des recluses, il y a deux petites nouvelles policières. Trois énigmes pour le prix d’une, c’est très rare, alors… Pourquoi se priver ?

Conseillé par (Libraire)
13 mai 2017

Dans un petit village au pied d'un montagne, un homme, ancien mineur, sculpteur et alpiniste, aide des "étrangers désorientés", en qui il voit des "compagnons d'infortune" à franchir une frontière. Comme le forgeron et le boulanger, il prend l'argent des clandestins, mais il le leur rend avant de les quitter. Jusqu'à ce qu'un écrivain fasse la traversée, parle de cette gratuité dans un livre et attire l'attention des médias sur cet homme. Devenu impopulaire dans son village, il s'installe dans un port, où le curé lui propose de restaurer un Christ, un marbre sculpté auquel avait été ajouté un drapé recouvrant "la gêne" qui faisait scandale. Après réflexion, il se lance dans le travail méticuleux qui restaurera "la nature exposée", qui rendra sa nudité au Christ en croix. Il parle de ce travail à l'ouvrier musulman avec qui il dîne, à un rabbin qui lui traduit un peu d'hébreu, à une femme incroyante. Il effectue ainsi un voyage intérieur. Il prend le risque d'aller jusqu'au bout de ce travail, sculptant le marbre que lui a offert l'ouvrier algérien, luttant puis s'abandonnant au moment de restituer sa nudité au Christ en croix.
En ces temps où sont propagés des propos honteux sur les réfugiés, Erri de Luca rappelle que nous partageons une commune humanité avec ces femmes et ces hommes, qu'ils ont l'héroïque courage de "quitter leur pays pour se rendre dans des endroits où ils ne connaissent personne, où ils survivent comme ils peuvent". La nudité du Christ est la parabole de ces "héros" qui ont tout abandonné.
Erri de Luca parle de ce qui le fascine, le sacré, la politique, la compassion, Naples et son musée, la montagne, la vie simple.
Cette fois, Erri de Luca, qui aime et sait aller à l'essentiel en peu de mots, nous offre un long livre... de 165 pages. Un beau livre, engagé, plein de poésie, de symbolique, de montagne, d'humanité. Un livre rare, jusqu'ici le plus étonnant de son œuvre, à lire, à relire, et sans doute à méditer.

Conseillé par (Libraire)
1 mai 2017

Laure est une jeune femme qui raconte son séjour en Angleterre où elle s'est perfectionnée en anglais, l'homme de la plage qu'elle a rencontré alors qu'il promenait son chien et donc elle est tombée amoureuse, l'enfant qu'elle commence juste à attendre, dont le père est cet homme. .
Elle raconte tout ceci à sa grand-mère hospitalisée, qu'elle visite chaque jour après son travail -elle est micromécanicienne en horlogerie. La grand-mère semble perdre la mémoire, être déphasée. Elle ne réagit pas quand Laure lui annonce qu'elle est enceinte, pourtant, plus tard, elle lui livre de grands fragments de sa vie, les inscrivant dans l'histoire de la jeune femme.
Ces deux femmes sont à l'opposé de leurs vies. Laure va devenir mère et engendrer une nouvelle vie. La grand-mère se dirige vers la fin de la sienne. Elles se livrent l'une à l'autre, nues, sans fard, en vérité.
Fanny Wodmann nous donne à voir les corps de ces femmes, corps de désir et corps de vieillesse tout en nous offrant l'intimité de ces deux vies d'une manière qui ne peut nous faire oublier leurs finitudes. Deux vies qui s'enrichissent l'une de l'autre faisant que la vie continue.
Émouvant et sensible.