Meurtre autour d'un conte de fée
Paris, 1912. Dimitri Ostrov, le secrétaire particulier de la comtesse russe Svetlana Slavskaïa s'apprête à faire une entrée officielle dans le monde et enfin côtoyer riches bourgeois ou politiciens influents. Grâce à l'excentrique comtesse, à laquelle il est entièrement dévoué, le jeune homme a obtenu une invitation à la soirée du génie de la mode Paul Poiret, sur le thème des « Mille et une nuits ». C'est parés de leurs plus beaux atours que tous deux se rendent à la réception tant attendue. Mais au matin de cette extraordinaire et inoubliable mille et deuxième nuit, le retour à la réalité est dramatique, la comtesse a été assassinée. L'enquête s'annonce très délicate.
À l'image des romans d'Agatha Christie, ce « Whodunit » à la française est une belle découverte, le lecteur sera rapidement charmé par l'atmosphère de folie qui s'en dégage. Cependant, au-delà des paillettes et des personnages fantasques rencontrés, Carole Geneix a intégré à son histoire un contexte social et historique qui lui apporte un bel équilibre.
Une découverte marquante !
L'héroïne, Naomi Cottle, est un genre de détective privée... Elle traverse les États-Unis à la recherche d'enfants disparus. Naomi a la réputation de toujours retrouver les petites victimes, mais pas toutes en vie, malheureusement. Aujourd'hui elle est chargée d'enquêter du côté de l'Oregon, sur la disparition de Madison, qui n'a plus donné signe de vie depuis trois ans. Mais à travers les recherches que Naomi mène, c'est aussi la lumière sur sa propre histoire qu'elle aimerait faire : de son propre passé, elle ne sait rien, sinon qu'elle a connu la maltraitance, et que lorsqu'elle s'est enfuie, elle a laissé derrière elle une petite sœur.
Le récit des différents personnages est tout en introspection, en émotion. Le style et la construction sont exemplaires, et le suspense maîtrisé jusqu'aux dernières pages... Une découverte marquante !
À quatorze ans, Thomas Bentley apprend brutalement que celui qu'il a toujours appelé Papa n'est pas son père biologique. À la relative insouciance de l'adolescence succède alors une montagne de doutes et de questions. En effet, le choc passé, il apparaît comme une évidence à Thomas qu'il était le seul de la famille à ignorer ce "secret" qui le touche pourtant au plus près. En dépit des réponses évasives de sa propre mère, le jeune homme entreprend, à partir d'indices recueillis auprès de ses proches, de remonter la trace de ce père inconnu, et dont le profil qui s'esquisse se révèle fascinant. Philippe Beyvin, directeur de collection aux éditions Gallmeister, nous livre un premier roman tout en sensibilité et émotion, dans lequel une destinée intime se fond dans la Grande Histoire. Une belle découverte !
"Requiem" signe le retour attendu de Darian Richards, ex-chef de la police criminelle de Melbourne, en Australie, et rencontré précédemment dans "La Promesse". Alors que le jeune retraité n'aspire plus qu'à contempler la rivière et éventuellement y pêcher quelques truites, il reçoit un appel au secours. C'est Ida, une jeune Autrichienne que Darian a sauvée des griffes d'un tueur en série quelques mois plus tôt. Lui qui la pensait à l'aube d'une vie nouvelle parmi d'autres étudiants sur la Gold Coast, il ignore totalement dans quels ennuis Ida s'est empêtrée. Mais libéré des contraintes légales de son ancienne profession, Darian n'hésite jamais à sortir des clous si nécessaire. Une enquête totalement dépaysante et rondement menée !
Se pourrait-il que le roman historique le plus marquant de 2019 nous soit parvenu dès le 2 janvier ? En ce début d'année, le talentueux et pourtant modeste écrivain, Hervé Le Corre, nous donne une double leçon, historique et littéraire : "Dans l'ombre du brasier" se déroule à Paris du 18 au 28 mai 1871, pendant les dix derniers jours de la révolte de la Commune. Presque tous les bourgeois ont quitté Paris, Adolphe Thiers lève une armée à Versailles afin d'écraser les insurgés pendant que les Communards tiennent fébrilement les barricades... De ce bord-là, il y a Nicolas Bellec, de Saint-Pabu et Caroline, sa promise, infirmière de fortune. Nicolas a pour compagnons Joseph Favereau, dit Le Rouge, un dur à cuire et Adrien, un gamin de tout juste quinze ans. Tous plus courageux les uns que les autres, tous résolus coûte que coûte à mener le combat jusqu'à son terme. Et pour maintenir l'ordre, un délégué à la sûreté a été élu : Antoine Roques qui, relieur de profession, hérite de la lourde responsabilité d'empêcher la ville de sombrer dans le chaos, entouré d'hommes qui ne savent plus trop à quel saint se vouer. Prenant sa tâche à cœur, le tout nouveau commissaire se met à la recherche d'un ravisseur de jeunes filles à la mine patibulaire. Cette crapule, c'est Henri Pujols, un personnage déjà présent dans "l'Homme aux lèvres de saphir". Pour ces hommes et ces femmes en lutte, au destin contrarié, c'est une course contre le temps qui s'engage.
À la manière des grands feuilletonistes de l'époque, Hervé Le Corre nous offre un roman magistral sans aucun temps mort, aucun personnage inutile ni aucun mot superflu. Une nouvelle fois, l'auteur d'"Après la guerre" excelle à mettre en scène des petites histoires d'anonymes dans les décors fascinants de la Grande Histoire. Le lecteur est littéralement transporté !