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Fragments d'un discours amoureux

Roland Barthes

Points

  • Conseillé par (Libraire)
    1 avril 2020

    Un véritable livre de chevet

    Il y a deux raisons de lire ou relire « Fragments d'un discours amoureux », en ce temps de confinement. D'abord parce que c'est une façon de se souvenir de Roland Barthes, disparu il y a tout juste 40 ans, le 26 mars 1980, renversé par une camionnette, rue des Écoles, en face du Collège de France, où il enseignait. Une jolie vidéo de l'INA, mise en ligne sur le site Culture Prime via Facebook, le 26 mars, est venue opportunément nous rappeler cet anniversaire, que l'actualité écrasante du moment nous aurait fait oublier sinon.
    https://www.facebook.com/Ina.fr/videos/au-quartier-latin-avec-roland-barthes-1972/523174928622375/

    L'autre raison de lire ou relire « Fragments d'un discours amoureux » est que, peut-être en pensant à cet anniversaire, les Éditions Points viennent opportunément de rééditer le livre, en format poche. La couverture de l'édition originale a été judicieusement conservée, illustrée d'un détail du tableau « Tobias et l'Ange », de Verrocchio. La beauté de cette peinture mériterait à elle seule qu'on achète le livre.
    « Fragments d'un discours amoureux » est l'exemple même du livre de chevet à lire ou relire au temps du confinement, comme nous y invite La Grande Ourse. Car comme son titre l'indique il est écrit sous forme de fragments, c'est à dire de textes courts, de quelques lignes. On peut en lire un, ou quelques- uns, chaque soir, avant de s'endormir, puis reposer le livre sur la table de chevet, où on le retrouvera demain, pour lire quelques autres fragments. C'est en cela qu'il est un livre de chevet , au sens propre. Et puis, évidemment, c'est un livre de chevet au sens où c'est un livre qui accompagne, vers lequel on revient, même si on l'a oublié quelque temps (sur la table de chevet), avec chaque fois le même émerveillement, devant l'intelligence, la finesse, la justesse du propos. Car peu de livres disent aussi bien ce qu'est le sentiment amoureux, le vécu de celui ou celle qui est amoureux.se. Barthes entre dans l'expérience amoureuse par le biais du discours. Pour lui les figures (au sens rhétorique du terme) du discours amoureux sont ce qui illustre le mieux les états amoureux. Ces derniers sont nombreux, et les figures du discours amoureux sont nombreuses aussi, que Barthes choisit d'égrener sous forme d'abécédaire, car au fond pourquoi privilégier une figure plutôt qu'une autre, un état plutôt qu'un autre. Tous se valent, tous font partie de l'amour, états heureux ou malheureux, émerveillés ou douloureux, innocents ou non. De « S’abîmer  » à « Vouloir saisir », en passant par « Attente », « Déclaration », « Image » « Ravissement » (nom populaire « Coup de foudre »), « Souvenir », etc, et bien sûr l'inévitable « Je t'aime », qui occupe le centre exact du livre, Barthes commente, s'interroge, ouvre des horizons, à la façon si personnelle qui est la sienne, mêlant souvenirs intimes et références littéraires ou philosophiques : Le Werther de Goethe (abondamment «  convoqué »), mais aussi Proust, le Haïku japonais, le lied allemand, Mozart, Platon, Nietzsche, et bien sûr Freud. Que cela n'effraie pas. « Fragments d'un discours amoureux » n'est pas un livre facile, certes (s'il l'était il serait sans doute beaucoup moins intéressant). Mais Barthes reste toujours « à hauteur d'homme », ou de femme. Ce qu'il décrit, chacun l'a vécu, sans souvent savoir le dire, sans parvenir à mettre des mots dessus, ce que lui fait si bien.
    Le livre s'ouvre sur cette phrase « C'est donc un amoureux qui parle, et qui dit..  » Allons donc écouter ce qu'il dit, et laissons nous ravir.

    A la maison bien entendu !

    Jean-Luc